Question à… Cécile Foissy, médiatrice et coach à Chaumont, en Haute-Marne (1) « Cultiver l’harmonie est le chantier de toute une vie. »
J’ai un nouveau voisin, qui arrive de la ville. Avec tout ce que j’entends sur les citadins qui s’installent à la campagne, je suis un peu inquiet. Que me conseillez-vous ?
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«D’abord, je vous invite à aller vous présenter et à découvrir ce que votre nouveau voisin sait, pense et imagine du monde rural. Essayez de comprendre ce qu’il y a derrière ses craintes, ses préjugés éventuels, ses idées reçues. S’il vous dit que vos vaches polluent, ne lui rétorquez pas que lui aussi, quand il prend l’avion. Au contraire, faites de la pédagogie. Expliquez le rôle des paysages, que les prairies sont des pièges à carbone, etc. S’il vous lance que les produits phytosanitaires polluent, demandez-lui ce qu’il sait de vos pratiques et parlez-lui du Certiphyto. Beaucoup de gens sont dans la méconnaissance rurale. Très peu de citadins ont visité une ferme. Or, c’est l’interconnaissance qui fait qu’un individu n’adopte pas une position extrême.
Dans mon métier, je rencontre régulièrement des personnes, agriculteurs ou non, qui vivent dans leur univers et sont tentés d’appliquer aux autres leur vision du monde. Souvent, les préjugés rassurent, mais ils nourrissent aussi les tensions. Fréquenter des gens qui nous ressemblent permet de rester dans sa zone de confort. L’homme a pourtant tout intérêt à faire l’expérience de la différence, sans toutefois tomber dans la comparaison. Il s’agit d’aller visiter le monde des autres comme on visite un pays inconnu .
Pour sortir de cette croyance qu’il y aurait une unique réalité, il faut engager la discussion. Sinon, on se fait une image de l’autre, avant même qu’il n’ait parlé. C’est dans le questionnement que mon opinion et celle de l’autre vont bouger. Parfois, nous-mêmes critiquons d’autres métiers sans les connaître. Or, nous aurions intérêt à nous y intéresser. Mais cette curiosité demande de l’énergie. Il faut avoir une bonne estime de soi pour y arriver. Et ce n’est pas facile quand on est en souffrance.
Comment prendre le temps de connaître l’autre sans être intrusif ? Il faut y aller avec respect et humilité, car tout le monde n’ouvre pas sa porte facilement. Entretenir des relations harmonieuses avec son entourage est, en fait, le chantier de toute une vie. L’hygiène relationnelle s’apprend. De plus, il faut savoir reconnaître ses erreurs. Et se dire, sans s’autoflageller : “Ce n’était pas terrible, la prochaine fois je ferai mieux.” »
Propos recueillis par Catherine Yverneau
(1) À la chambre d’agriculture de Haute-Marne.
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